Chez Madame la Mère Chatte
(Morceau de salon… littéraire)
Enfilade de pirouettes! Et quel choix
de voiles, d’escarpins, de tutus!
C’est la gent trotte-menu
qui valse en croquant ses petits-beurre
chez Madame Lettrée La Mère Chatte
(libraire-éditeur-imprimeur)
qui reçoit tous les vendredis.
“Tout le monde est là!” -- “Bousculades…
un trop-plein…j’en ai marre, ça m’excède…” -
“Cafouillage? – il s’en moque, me persifle –
Boustifaille pour chatons, mon ami!”
“Boursouflure…” – “Pas ton monde?...
Si ça te fiche le cafard, fou le camp!
Va-t-en! Qu’est-ce que t’attends? Moi? Je reste.”
Il demande du caviar,
une flûte de Chandon et une serviette.
“Je m’amuse, au contraire…-- il chuchote --
C’est chouette, finalement…ha ha ha!
C’est marrant! de les voir s’escrimer…
s’approcher de la grande souricière…”
“Marchander n’importe quoi! même les miettes…”
“Bon, surtout leur petite queue…de surchoix.
La vendre aux enchères…” – “Et puis encore…”
“S’acharner?…S’chamailler comme belettes
pour une bite de poulet!…-- il ricane --
quand ça sent quelque peu l’ camembert…
Pas gourmand, toi?...C’est vrai? Quel dommage!
Ce foie d’oie…uhmmm… première qualité.
Profiter…profiter! maintenant …
que Madame cherche à bien…”
“…les rouler, par surcroît?...
Ecoute-la, quel propos! Elle méprise…”
“Les poétereaux?…-- il sirote son champagne –
Vos bouquins? Vos…hmm… plaquettes? Laisse-moi dire:
crinières trop soignées, trop froufrou,
trop vieux-jeu pour les crânes des bourgeois
autrement bien polis de nos jours.
Gendelettres démodés…vous, racaille!…
Chemineaux affamés! …Quémendeurs
criblés d’ postillons! Et quand même…
regarde-toi, quel fier nez en trompette!…
Quatre sous chaque coco et...”
“…mille balles pour tes œufs d’alouette?
Etalés au marché à la volaille.”
“Mes… bijoux?! Ah, mon petit!
Mes romans po-li-ciers, c’est autre chose!
De la prose rose-et-noir… qui rapporte.
Pas bête, ni merdeuse, la Mère Chatte:
on t’invite chaque semaine, on dépense…
et alors, pour remplir sa tirelire,
‘l faut tricher… avec vous…c’est normal.
Pourquoi pas faire danser
ha! ha! l’anse du panier?
Toi, en plus…t’es malin: dix copies
de tes…hmm… paroissiens? dix cadeaux…”
“Réservés pour Noël aux… amis?
Ceux qui ne savent même pas lire leurs journaux.”
(Roberto Vittorio Di Pietro –
dalla silloge ”Rock bottom remainders”)
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